À Montréal, le mois de juillet est féérique. L’été y prend ses aises et s’installe avec splendeur et nonchalance. Une flore exubérante achève de conquérir parcs, rues et balcons et une agréable douceur de vivre se répand dans toutes les artères de la ville. Sur les rives paisibles du Saint-Laurent, badauds et pêcheurs contemplent le fleuve qui, inexorablement, déroule majestueusement ses flots sous les cris de quelques joyeuses bernaches.
Cet été aussi, rien ne semblait troubler la quiétude de cette nature insouciante, malgré les mesures de distanciation imposées par la pandémie causée par ce satané couple formé d’un pangolin et d’une chauve-souris.
C’est dans cet environnement idyllique qu’un quatuor cybernétique organisa un débat pompeusement baptisé « Que faire face à la répression des libertés? » [1] sur AlternaTV, une WebTV domiciliée à Montréal. Ce media « champignon » n’est pas sans nous rappeler un autre membre de cette espèce taxonomique, en l’occurrence Radio Corona Internationale récemment renommée « Radio Khorti Internationale » [2]. Elles se partagent les mêmes accointances médiatiques, les mêmes invités qui s’autocongratulent et s’autocomplimentent béatement tout en bannissant toute voix présentant la moindre inflexion par rapport à la leur. Et de quoi pensent-elles être le porte-drapeau? De la liberté d’expression, rien de moins!
Qu’on se le dise : la consanguinité intellectuelle ne mène qu’à une inéluctable déliquescence idéologique.
Le quatuor en question était constitué de trois Montréalais et d’un invité de marque, en direct d’Alger. Il y avait donc, respectivement : Fatiha Ghazi, Arabi Mohamed, Rabah Moula et Hakim Addad.
C’est dans cette émission que mon récent livre [3] a été négativement critiqué par ces « intellectuels » fantoches qui ont tous reconnu, toute honte bue, ne pas l’avoir lu!
Que faire alors face à la répression contre ma liberté d’expression? J’aurais pu leur répondre si une invitation m’avait été adressée, d’autant plus que je demeure dans la même ville que trois de ces discuteurs infatués, pas loin des rives du Saint-Laurent. J’aurais pu leur présenter mon livre et même leur offrir gracieusement quelques copies dédicacées pour qu’ils puissent, au moins, discutailler d’un sujet qui ne leur est pas étranger. Mais non, leur définition de la liberté d’expression s’apparente beaucoup plus à une dictature de la pensée qui prône une médecine expéditive : l’ablation de toute langue qui n’est pas compatible avec leurs élucubrations idéologiques. Ah! Elle va être belle cette Algérie nouvelle!
Comme je n’ai pas eu cette opportunité, je me suis décidé à répondre à chacun d’eux, histoire d’élever le niveau du débat.
Fatiha Ghazi
Commençons avec la représentante de la gente féminine dont la jeunesse et la frivolité contrastait avec le reste. C’était à se demander ce qu’elle faisait en compagnie de ce trio de la gauche bobo, jusqu’à ce qu’elle commence à pérorer. Il était alors facile de constater que son argumentation épousait les moindres contours de celle de ses collègues. Tout d’un coup, elle paraissait plus vieille qu’eux.
Au sujet de mon livre, elle a affirmé s’être arrêtée au titre (2h28’). Elle dit se méfier de toute personne invitée par les chaînes étatiques algériennes. Elle ne s’est pas demandé pourquoi aucune chaîne privée (TV ou radio) n’ont daigné m’inviter. Ni pourquoi aucun de ces journaux privés algériens qui nous ressassent des leçons de démocratie et de liberté d’expression ne m’a donné la parole, ni a fait une recension de mon livre qui a fait le buzz. Seul le « grand » journal démocratique El Watan (plus connu comme El wOTAN) a commandité plusieurs articles à charge sans jamais citer une seule phrase de mon livre, ni commenter un des nombreux documents authentiques qui y figurent. Protéger ses copains : une règle de « l’éthique journalistique » à ne jamais enfreindre chez les médias « démocrates ».
J’avais un petit doute, mais depuis la publication de mon dernier livre, force est de constater que notre pays possède un système médiatique rétrograde, gangréné et malsain. Une vraie « 3issaba » [4] qu’il est impératif d’arracher par les racines car l’Algérie ne sera jamais « nouvelle » avec une telle engeance.
Offusquée par ma présence « délictueuse » sur certains médias algériens, cette jeune damoiselle ne semble pas gênée par l’omniprésence de son invité, Hakim Addad, sur les médias étatiques français : AFP [5], France Culture [6], TV5 Monde [7], RFI [8], etc.
La cécité sélective fait aussi partie de la « déontologie » spécifique aux médias de caniveaux. Ou peut-être est-elle atteinte, elle aussi, du syndrome du néocolonisé qui fait croire que ces médias français sont si neutres, si professionnels et si humanistes? Novice et néophyte vu son jeune âge, elle doit certainement ignorer leur intime relation avec le Quai d’Orsay.
Celle qui se présente comme la « super-connectée…à Tiaret » (2h 15’), se dit prête à discuter avec n’importe qui, y compris les membres de Rachad (islamistes de l’ex-FIS). Elle refuse cependant le droit de parole à un auteur dont le livre a été publié par une maison d’édition algérienne privée et qui est disposé à en débattre avec quiconque, y compris ceux qui sont cités dans son livre.
À vrai dire, je ne me fais pas d’illusion sur les trois autres membres du quatuor, mais j’aurais espéré que la jeunesse algérienne, surtout celle qui a l’opportunité de vivre dans un environnement où les droits de la personne sont traditionnellement ancrés dans les mœurs, soit plus ouverte à la discussion argumentée et au débat contradictoire. Quelle déception de voir la Tiaretienne « super-connectée » complètement déconnectée des valeurs basiques de la démocratie!
Un conseil : si vous voulez faire partie de cette Algérie nouvelle qui nous tient à cœur, fréquentez de vrais progressistes qui respectent effectivement le jeu démocratique et évitez comme la peste les politicards de seconde zone et les « losers » qui n’ont absolument rien appris après des décennies de pseudo-militantisme stérile.
Autre conseil : appliquez-vous à parfaire votre grammaire : « habituelle » n’est pas le féminin de « habitué » (1’).
Fatiha Ghazi sur Al Magharibia TV (Awraas) en compagnie de Yahia Makhiouba (Rachad)
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Arabi Mohamed
Tout comme la « super-connectée » de Tiaret, M. Arabi a axé ses chétives interventions sur, essentiellement, deux points : l’absolution de Rachad et la diabolisation de Bensaada. Mais dans quel monde vit cet individu?
Il faut se rendre à l’évidence que le Hirak a révélé des accointances insoupçonnées entre des entités qui, normalement, sont soumises à la loi de la répulsion.
Voici quelques-unes de ses déclarations :
« Zitout c’est un Algérien, il a les mêmes droits que nous […] » (2h).
« Si Rachad est capable de porter ce projet-là, moi je me sentirai très proche, pas politiquement, je reconnais un Algérien avec lequel je peux construire une nouvelle Algérie et je lui donne son droit d’exister » (2h02).
Je ne savais pas que M. Arabi était le double détenteur du sceau de l’Algérianité et du droit d’exister? La double prétention d’un cerbère, gardien du pays et de la vie? Et Bensaada, est-il un Algérien avec les mêmes droits que vous? A-t-il au moins le droit d’exister?
J’en doute fort si j’écoute vos divagations:
« Des Bensaada, il y en eu toujours dans l’histoire de l’humanité, surtout quand cette humanité commence à lutter pour ses droits, pour ses aspirations […] » (2h 26’)
On se l’imagine bien le cerbère aux crocs acérés, bavant et mordant avec ses trois têtes : l’algérianité, l’humanité et l’existence!
Ça n’en fait pas trop pour un seul homme, surtout qu’il n’a qu’une seule tête qui est loin d’être celle à Papineau?
Je vais me permettre de légèrement corriger les grognements du cerbère :
« Des Bensaada, il y en eu toujours dans l’histoire de l’humanité, surtout quand cette humanité a besoin de quelqu’un pour dévoiler les félons et les tartuffes, les collabos et les faux jetons ».
Pris par l’élan de son laïus, M. Arabi a réussi un tour de force inimaginable : comparer deux livres sans en avoir lu aucun d’entre eux!
Hakim Addad applaudissant les commentaires de Arabi Mohamed sur deux livres...qu'il n'a pas lus !
Vidéo @ 2h 26' 18''
Il encensa ainsi celui de Hocine (Patrick) Belalloufi et vilipenda le mien. En connaissait-il les contenus? Même pas la peine! Le cerbère apprend sans lire et explique sans comprendre. Surtout lorsque celui qu’on flagorne est un copain de la même appartenance politique et que, des années durant, il a travaillé avec son autre ami, Rabah Moulla. Les amis des amis ne sont-ils pas nos amis?
Le Hirak s’étant soulevé contre la « 3issaba » afin de bannir le copinage et prôner le mérite, ce quatuor cybernétique et ses suiveux ne se comportent-ils pas pire que ceux qu’ils prétendent combattre?
M. Arabi a aussi tenté de faire de l’humour en parlant d’Otpor [9]. Si j’avais été invité, je lui aurais suggéré d’en parler à son compère de lutte, Hakim Addad, un expert en la matière. Ce monsieur connait bien les membres fondateurs de cette organisation serbe, puisqu’il les a côtoyés et a assisté à leurs conférences lors de la seconde assemblée mondiale du « World Movement for Democracy » (WMD) qui s’est tenue à Sao Paulo (Brésil) du 12 au 15 novembre 2000.
Alors, M. Arabi, êtes-vous plus familier avec Otpor? Et qu’en est-il de la National Endowment for Democracy (NED) qui organise ces assemblées mondiales?
Voyez-vous, si vous aviez lu les livres de Bensaada, vous auriez eu l’air un peu plus intelligent. Vous savez, la lecture, ça aide.
Rabah Moulla
Ce hâbleur intrépide est aussi un de ceux qui ont intégré le copinage dans leur bagage génétique politique. Appartenant à la même « secte » que Belalloufi, il a travaillé avec lui à Alger Républicain, ce qui explique la présence de ce cordon ombilical transatlantique qui nourrit leur mimétisme psychique.
Belalloufi au sujet d’un de mes articles : « Ces textes s'avèrent finalement d'une navrante pauvreté » [10].
Moulla au sujet de mon livre (sans l’avoir lu): « Ce livre, c’est de la camelote! » (2h 28’)
Mais si mes textes sont aussi pauvres et mes livres de la camelote, pourquoi alors s’y intéresser? Pourquoi y consacrer des articles et en parler dans une émission sur « la répression des libertés » (sic!)? Pourquoi Rachad a recruté huit auteurs dont rien de moins qu’un ancien président tunisien pour y répondre?
De la « camelote », un « Koutayeb » selon sir Zitout, un des partenaires politiques du quatuor.
Même langage, mêmes mœurs. Gauche bobo, islamistes de l’ex-FIS : même combat!
C’est d’ailleurs à leur sujet et de Rachad que Moulla déclare :
« Les débats sont nécessaires » (2h11’)
« Toutes les idées doivent être débattues avec sérénité, avec respect » (2h12’)
Et « la camelote », c’est du respect M. Moula? De la sérénité, peut-être?
M. Moulla a même vu des barbus avec des filles en mini-jupes, « presque » main dans la main (2h 13’).
Ne les auraient-ils pas vus, par hasard, dansant lascivement le tango, barbe contre joue, sur l’esplanade de la Grande-Poste?
Est-ce l’élucubration d’un bisounours dans les vapes ou la duplicité d’un politicailleur qui pose les tapis pour Rachad and Co.?
Dans un de ses anciens articles, M. Bisounours-gauche-bobo s’était posé la question suivante :
« Lorsqu'on sait que l'Irak, la Libye et la Syrie se sont transformés en zones où sévissent les pires groupes sanguinaires suite à l'intervention de ces mêmes puissances [occidentales], qu'est-ce qu'on peut opposer comme arguments sérieux et irréfutables aux théories affirmant l'existence d'un vaste complot ourdi par l'Occident et visant la déstabilisation du monde « musulman » et n'hésitant pas à employer tous les moyens pour sa mise en œuvre? » [11]
Ce n’est pas compliqué : la réponse se trouve chez sir Zitout et ses acolytes de Rachad qui ont appuyé et applaudi la destruction de ces trois pays. Vous n’avez qu’à leur poser la question la prochaine fois que vous débattrez avec eux, dans le respect et la sérénité.
Dans un autre article datant de la même période, « celui-qui-a-vu-les-barbus » déclara :
« Les dizaines de journalistes tombés dans les années 90, en Algérie, n'avaient pas eu droit à ce formidable élan de solidarité internationale qui salue à juste titre la mémoire des victimes de Charlie Hebdo. » [12]
Pourquoi ne parler que de la solidarité internationale? Pourquoi ne pas dénoncer ses amis de Rachad, en particulier Mourad Dhina? N’a-t-il pas déclamé, sans sourciller:
« Que ces intellectuels de gauche aient le courage d’assumer leur action, qu’ils disent nous nous sommes engagés dans une guerre et que certains d’entre nous ont payé de leur vie. Qu’ils en fassent des martyrs pour eux! » [13]
Les « intellectuels » de gauche? Ça vous dit quelque chose? Vous savez, ce quatuor qui se vautre actuellement, en ligne, dans la litière de la compromission?
Qu’avez-vous donc fait de vos martyrs, M. Bisounours gauchiste?
M. Moulla n’est pas à une contradiction près. Selon des témoins oculaires, il a fait partie de ceux qui empêchaient les citoyens de voter à l’élection présidentielle au consulat algérien à Montréal, en décembre dernier. Contradiction car ce monsieur a été lui-même candidat (malheureux) à l’élection provinciale québécoise une année plus tôt, en 2018 [14].
Comment aurait-il réagi si des manifestants avaient entravé ce scrutin? Quelle aurait été la réaction des électeurs québécois? Du gouvernement québécois?
Ce pseudo-démocrate « empêcheur de voter » est membre de Québec Solidaire, un parti québécois de gauche. Durant le Hirak montréalais, il n’hésitait pas à y inviter ses collègues du parti, histoire d’internationaliser une affaire purement algérienne. C’est ainsi qu’on l’a vu manifester en compagnie de Andrés Fontecilla, député québécois [15] d’origine chilienne.
L’ingérence québéco-chilienne dans un événement purement algérien ne s’est pas arrêtée au pouce levé dans une ambiance festive, loin de là. Sans doute conseillé par son ami algérien, M. Fontecilla poussa son engagement hirakiste jusqu’à présenter une motion « dénonçant la répression en Algérie » adoptée le 5 novembre 2020.
Cliquez sur l'image pour voir la vidéo de l’événement
Petite précision : cet évènement a été transmis en direct par…AlternaTV et repris par Yahia Mekhiouba, un membre influant de Rachad!
En passant, M. Y. Mekhiouba était l’invité de AlternaTV, le 27 septembre dernier : la collaboration active AlternaTV-Rachad avant même d’en avoir débattu « avec sérénité et respect ».
Mais que vient faire ce député québéco-chilien dans les affaires de l’Algérie? De quel droit se mêle-t-il de la constitution algérienne? Est-ce que l’Algérie a fait un quelconque commentaire sur la loi 21 qui est jugée liberticide, voire raciste [16]? Et qu’aurait-il pensé si le gouvernement algérien avait adopté une motion « pour soutenir le peuple québécois et réclamer le respect des droits humains »?
Et quelle a été la réaction de M. Moulla à cette ingérence étrangère caractérisée envers son pays d’origine et pour lequel il prétend apporter démocratie et souveraineté?
Des remerciements et des fleurs pour cet acte d’intrusion avec effraction dans la politique de votre pays!
La camelote, c’est vous, M. Moulla!
Hakim Addad
L’invité d’honneur de l’émission était évidemment M. Hakim Addad en personne. Pour celles et ceux qui ne le connaissent pas encore, ce monsieur est le fondateur et l’ancien leader du RAJ (Rassemblement Actions Jeunesse). Cette ONG créée en 1992 a été en première ligne de la contestation en 2011 comme membre du CNCD [17] et en 2019, au sein du Hirak. Actuellement, elle est présidée par Abdelouahab Fersaoui.
Nous avons vu auparavant que Hakim Addad avait participé à la seconde assemblée mondiale du WMD. Il a aussi participé à la première édition, qui s’est tenue à New Delhi, du 14 au 17 février 1999.
Abdelouahab Fersaoui, quant à lui, a été invité à la neuvième édition de cet évènement qui s’est tenu à Dakar (Sénégal), du 6 au 9 mai 2018 [18].
Le communiqué de presse publié sur le site du WMD est très clair sur la mission du WMD:
« Le Mouvement mondial a été fondé en 1999 dans le but de "renforcer la démocratie là où elle est faible, de la réformer et de la revigorer même si elle existe depuis longtemps, et de renforcer les groupes pro-démocratie dans les pays qui ne sont pas encore entrés dans un processus de transition démocratique". […] Le mouvement mondial est dirigé par un comité directeur international distingué; Le National Endowment for Democracy (NED), basé à Washington, en est le secrétariat. » [19]
La NED (National Endowment for Democracy), un des plus importants organismes américains d’« exportation » de la démocratie, a été très impliqué dans les « révolutions colorées » et le « printemps » arabe [20].
Le fait que les deux leaders du RAJ aient été invités au WMD n’est pas du tout anodin. Il s’agit d’une consécration.
En effet, le RAJ est la plus ancienne ONG algérienne subventionnée par la NED.
Le tableau suivant montre que la NED a commencé à financer les organisations algériennes en 1996.
Financement de la NED entre 1990 et 1999
(Source NED)
C’est en 1997 que le RAJ a reçu la première subvention de la NED. Le montant s’élevait alors à 50 000$.
L’ensemble du financement octroyé au RAJ par la NED est résumé dans le tableau qui suit :
National Endowment for Democracy Financement du RAJ |
|
Année |
Montant ($) |
1997 |
50 000 |
1998 |
52 000 |
1999 |
52 000 |
2000 |
52 000 |
2001 |
45 000 |
2011 |
25 000 |
2012 |
Non publié |
2013 |
30 500 |
2015 |
60 000* |
2017 |
35 500* |
2019 |
25 000* |
Subventions octroyées par la NED au RAJ entre 1997 et 2019
(Source : NED)
Il est à noter que de 1997 à 2000, le RAJ était la seule ONG financée par la NED.
Dans les trois dernières subventions (celles avec des *), le nom du RAJ n’est pas spécifiquement mentionné (ni aucune autre ONG algérienne d’ailleurs). La NED a souvent recours à cette technique pour masquer l’identité de ses récipiendaires.
Il est possible, cependant, de les identifier en comparant les textes explicatifs de leurs missions avec ceux d’avant 2013 où le nom du RAJ est clairement indiqué (voir la figure suivante).
Description des missions du RAJ en contrepartie des subventions de la NED (Années 2011, 2013, 2015, 2017 et 2019)
On remarque que le montant octroyé en 2015 (60 000$) servait, entre autres, à « lancer une plateforme de radio en ligne ».
C’est donc grâce à cette somme que le RAJ a lancé sa « Radio RAJ » le 3 mai 2016 [21], avec son fameux logo qu’on retrouve même sur le site du WMD [22] :
Radio RAJ : Made in USA!
M. Belalloufi, dont Hakim Addad a encensé le livre (tout en discréditant le mien, sans le lire) est un habitué de cette radio :
Hocine Belalloufi et Abdelouahab Fersaoui à Radio RAJ
La culture du copinage discutée précédemment s’illustre bien par les relations Belalloufi-RAJ devant des micros et sous le sigle du « poing fermé ».
Et pour boucler la boucle, voici un exemple de la relation RAJ-Rachad :
La NED étant la vitrine publique de la CIA, on retrouve des informations intéressantes sur le site de cette agence américaine, dans la rubrique « groupes de pression politique et leaders » :
L’émission du quatuor sur AlternaTV s’est terminée en apothéose avec une longue tirade de Hakim Addad au sujet de ses relations avec des organisations étrangères:
« Je ne démentirai pas là-dessus. Il est logique et il est normal que ce soit des associations, des partis politiques, des syndicats ou des individus, des militants politiques aient des rapports avec des amis et des camarades à l’étranger. Et oui, j’en ai et oui, nous en avons eu en ce qui concerne en mon temps au RAJ et cela ne nous fait pas honte.
Nous avons des camarades, nous avons des gens, parce que le pouvoir en Algérie ne vacillera pas et ne changera pas juste par notre propre force. Il y a des forces de l’intérieur, il y a effectivement des Algériennes et des Algériens à l’extérieur, mais il y a des amis du peuple algérien et de ce pourquoi se battent les Algériennes et les Algériens. En l’occurrence, il y a des amis de valeur. Et oui, des amis de valeur je n’en ai pas qu’en Algérie, mais il y en a partout à travers le monde. Je suis un internationaliste et je suis fier de l’être. » (2h 24’)
Cette déclaration a au moins le mérite d’être claire. M. Addad affirme que sans l’ingérence étrangère, point de « révolution ». En d’autres termes, sans la NED, point de salut.
Cette conception extrinsèque assumée des révoltes populaires, qui prône l’indispensable assistance d’une puissance étrangère, n’est pas nouvelle et plusieurs exemples peuvent être cités.
Commençons par Slim Amamou, le célèbre cyberactiviste tunisien qui avait reconnu avoir été « aidé » - lui et tous les cyberactivistes tunisiens et arabes - par la CIA pour accomplir leurs « révolutions » [23].
Cliquez sur l'image pour visionner la vidéo
Encore un autre bisounours qui pense que la CIA est une entreprise caritative. Cette naïveté politique explique pourquoi les cyberactivistes disparaissent complètement du paysage politique lorsque les pays sont « colorés » ou « printanisés ».
Citons aussi Wael Nawara, l’ancien secrétaire du parti égyptien El Ghad (fondé par Ayman Nour, un opposant fortement soutenu par Washington), qui reconnait avoir reçu des subventions de la NED (et aussi du NDI, IRI, POMED, etc.) dans la vidéo suivante [24] :
Cliquez sur l'image pour visionner la vidéo (@ 2’ 40’’)
Pour compléter le tableau, n’oublions pas les islamistes djihadistes et leurs relations avec l’administration américaine.
Dans cet extrait vidéo [25], le djihadiste « afghan » d’origine algérienne, dont le nom de guerre est Abdallah Anas, nous fait quelques confidences sur le rôle des Américains dans la guerre contre les Russes, en Afghanistan. Il faut savoir que Abdallah Anas est le gendre de Abdallah Azzam qui est considéré comme l’« imam du djihad mondial ».
Cliquez sur l'image pour visionner la vidéo (@ 3’ 50’’)
Armés, soutenus et utilisés par Washington, ils ont servi les intérêts américains dans leur guerre contre la Russie.
Nous n’allons pas clore cette séquence sans une photographie « cocasse » qui avait à l’époque défrayé la chronique : des djihadistes syriens posant sous une tente, gracieuseté de l’USAID (US Agency for International Development). Rappelons que tout comme la NED, l’USAID fait partie de l’arsenal étasunien dédié à l’« exportation » de la démocratie [26].
Des djihadistes syriens posant dans une tente fournie par l’USAID
Quand on voit ce que sont devenus l’Afghanistan et la Syrie, il est légitime de se poser de sérieuses questions sur les « amis » de Hakim Addad.
À propos d’amis, ceux de la Syrie ont déjà montré la profondeur de leur « amitié » en termes de destruction, de massacres, d’exil et de chaos.
Tunisie (24 février 2012) | Turquie (1er avril 2012) |
France (6 juillet 2012) | Maroc (12 décembre 2012) |
Jordanie (22 mai 2013) | Qatar (21 juin 2013) |
Et pendant que ce beau monde tiré à quatre épingles se réunissait dans de luxueux palaces, voici ceux qui sont supposés bénéficier de leur amitié :
Réfugiés syriens au point de passage Peshkhabour à Dahuk (430 km au nord-ouest de Baghdad, Irak),le mardi 20 août 2013 (AP / Hadi Mizban) |
Les ruines de la ville syrienne de Homs - 10 mai 2014 – (Ghassan Najjar/Reuters) |
Alors M. Addad, après New Delhi et Sao Paulo, rêvez-vous de participer à de telles rencontres avec la jet-set mondiale, dans des hôtels de luxe, en compagnie des Belalloufi et des Zitout?
Conclusion
Pathétique! Tant d’efforts pour atteindre le but inverse!
Ce quatuor, qui s’est évertué à discréditer mon livre, confirme chaque idée qui y est consignée.
Primo, l’ingérence étrangère n’a pas seulement été prouvée, mais elle est recherchée et complètement assumée. Et ce, que ce soit au niveau du financement, de la formation, de l’équipement, du réseautage ou du soutien de certains groupes surfant en première ligne sur le Hirak, à Alger ou Montréal.
Secundo, cette émission a clairement montré la relation synergique entre les « démocrates » et la gauche-bobo avec le mouvement Rachad, en parfait accord avec ce qui a été explicité dans mon ouvrage.
Relation synergique entre certaines composantes du Hirak
D’autre part, ceux-là même qui prétendent instaurer en Algérie un état de droit dans lequel la liberté d’expression est reine, donnent une piètre image de leurs allégations. Ils discréditent les ouvrages de certains auteurs sans les avoir lus, encensent ceux de leurs « amis », insultent les premiers tout en prenant le soin de porter aux nues les seconds.
Ils invitent à leurs émissions leurs acolytes et sosies intellectuels en utilisant le principe de la chaise musicale et refusent la parole à ceux qui risqueraient de déstabiliser leurs certitudes.
Leur « Algérie de demain » n’est finalement pas tellement différente de « l’Algérie d’hier ».
Illustrons cela avec les exemples d’AlternaTV et de Radio M:
Le copinage médiatique entre Radio M et AlternaTV
Cet exercice pourrait être répété pour d’autres médias comme Al Magharibia ou Radio « Khorti » Internationale et le résultat serait exactement le même, avec une liste un peu plus grande, mais bien connue.
Finalement, il est important de signaler que l’étude des mouvements de protestation populaire qui ont secoué de nombreux pays depuis le début du siècle montre que l’ingérence étrangère est néfaste pour les nations et qu’elle hypothèque leur souveraineté, leur intégrité et leur stabilité.
La révolte du peuple algérien a été unique, grandiose et majestueuse. Le seul et unique leitmotiv qui doit la guider est : « un Hirak algéro-algérien ».
Aujourd’hui, l’hiver a couvert les rives paisibles du Saint-Laurent d’un mince manteau blanc, avant-goût d’une saison qui s’annonce âpre. Sur ses berges, badauds et pêcheurs se font rares.
Ce tartarinesque quatuor cybernétique aurait-il encore besoin d’un complément d’information? Si c’est le cas, pourquoi alors ne pas se donner rendez-vous, dans une autre émission, lorsque les joyeuses bernaches seront de retour?
Références
[1] AlternaTV, « Que faire face à la répression des libertés », Facebook, 11 juillet 2020, https://www.facebook.com/alternatv.info/videos/2626693127596895/
[2] Ahmed Bensaada, « De la liberté d’expression au temps béni du Hirak », AhmedBensaada.com, 15 juin 2020, http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=516:2020-06-16-03-01-22&catid=46:qprintemps-arabeq&Itemid=119
Khorti : mensonge grossier en arabe dialectal algérien
[3] Ahmed Bensaada, « Qui sont ces ténors autoproclamés du Hirak algérien ? », Editions APIC, Alger 2020
[4] En arabe : bande mafieuse
[5] AFP, « Algérie : pendant la pandémie, la répression contre le "Hirak" continue », 6 avril 2020, https://www.lepoint.fr/monde/algerie-pendant-la-pandemie-la-repression-contre-le-hirak-continue-06-04-2020-2370261_24.php#
[6] France Culture, « Algérie : que reste-t-il des promesses démocratiques? », 18 août 2020, https://www.franceculture.fr/personne/hakim-addad
[7] TV5 Monde, « Hakim Addad : "Le pouvoir algérien essaie de duper la population" », 12 mars 2019, https://www.youtube.com/watch?v=U9B8jMkNDOQ
[8] RFI, « Annonces du président Bouteflika: réécoutez l’émission spéciale de RFI », 12 mars 2019, https://www.rfi.fr/fr/afrique/20190312-algerie-annonces-bouteflika-emission-speciale-rfi-ecoute
[9] Mouvement serbe, largement financé et formé par les organisation américaines d’« exportation » de la démocratie, qui a été l’acteur principal de la révolution colorée en Serbie
[10] Kamel Lakhdar-Chaouche, « L'Occident préfère un régime soumis à ses intérêts », L’Expression, le 17 avril 2019, http://www.lexpressiondz.com/nationale/loccident-prefere-un-regime-soumis-a-ses-interets-314185
[11] Rabah Moulla, « Que faut-il opposer aux théories du complot? », HuffPost, 28 janvier 2015, https://quebec.huffingtonpost.ca/rabah-moulla/que-faut-il-opposer-aux-theories-du-complot-_b_6535988.html
[12] Rabah Moulla, « De quoi l'horreur a-t-elle besoin? », HuffPost, 10 janvier 2015, https://quebec.huffingtonpost.ca/rabah-moulla/de-quoi-lhorreur-a-t-elle-besoin_b_6442818.html
[13] Youtube, « L’hypocrisie de Mourad Dhina », Vidéo mise en ligne le 21 février 2013, https://www.youtube.com/watch?v=M9pawvvpusI&feature=emb_logo
[14] Élections Québec, « Élections générales – 1er octobre 2018 – Chomedey », https://www.electionsquebec.qc.ca/francais/provincial/resultats-electoraux/elections-generales.php?e=83&c=1087&s=1
[15] Assemblée Nationale du Québec, « Andrés Fontecilla », http://www.assnat.qc.ca/fr/deputes/fontecilla-andres-17953/index.html
[16] Hélène Jouan, « Canada : la laïcité à la québécoise critiquée par les autres provinces », Le Monde, 16 décembre 2019, https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/12/16/le-canada-critique-la-laicite-a-la-quebecoise_6023026_4500055.html
[17] Algeria-Watch, « Pour une Coordination Nationale pour le Changement et la Démocratie », 23 janvier 2011, https://algeria-watch.org/?p=34161
[18] Pour une discussion détaillée sur cet évènement, veuillez consulter la référence suivante :
«Ahmed Bensaada, « Belalloufi, le RAJ et l'importation de la démocratie », AhmedBensaada.com, 2 mai 2019, http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=490:2019-05-02-15-00-34&catid=46:qprintemps-arabeq&Itemid=119
[19] WMD, « Press Release : Ninth Global Assembly », 23 mars 2018, https://fr.calameo.com/read/00036684657a50e4f2992
[20] Pour plus d’information sur le rôle de la NED, lire : Ahmed Bensaada, « Arabesque$ - Enquête sur le rôle des États-Unis dans les révoltes arabes », Ed. Investig’Action, Bruxelles (Belgique), 2015 – Ed. ANEP, Alger (Algérie), 2016
[21] Wftufise, « Radio du RAJ "Voix de jeunes", une radio libre pour une parole libre » 25 novembre 2017, https://www.medias-dz.com/radio/radio-raj-voix-des-jeunes-web-radio-algerienne/
[22] WDM, « Radio RAJ », 16 mars 2018, https://www.movedemocracy.org/participant/radio-raj-algeria/radio-raj
[23] Youtube, « Tunisie – Slim Amamou. USA CIA. Et le MJIC alors? », Vidéo mise en ligne le 13 mars 2013, https://www.youtube.com/watch?v=JGjb1TuEG-Y
[24] Russia Today, « Taxpayer billions promote democracy hoax abroad », Youtube, Vidéo mise en ligne le 19 novembre 2010, https://www.youtube.com/watch?v=-MCgHDoZHJg
[25] Edaat, « Abdallah Anas – 2/4 », Youtube, Vidéo mise en ligne le 15 septembre 2009, https://www.youtube.com/watch?v=9DawQIhZwaA
[26] Voir réf. 20