21e SILA - Conférence d’Ahmed Bensaada sur « le printemps arabe »
La face cachée de la démocratie à l’américaine
Publié le 30 octobre 2016
Le docteur en physique à l’Université de Montréal, l’Algérien Ahmed Bensaada, est un intellectuel déclaré persona non grata aux Etats Unis. La raison ? Un déni d’expression dans ce qui est présenté comme le modèle par excellence de la démocratie.
Dans l’après-midi de samedi dernier, dans le cadre du cycle de conférences organisé par le Sila à l’amphithéâtre Noureddine-Nait-Mazi de l’Ecole nationale supérieure de journalisme, la problématique du « printemps » arabe, à l’aune du rôle fondateur des Etats-Unis, valait bien le détour. Le président-directeur général de l’Anep, Djamel Kaouane, considère que le livre du professeur est le best-seller du Sila 2016.
L’opportunité d’un débat sérieux, modéré par Mohamed Balhi et suscitant le bouillonnant satisfécit du consultant Sid Ali Sekhri, valait effectivement plus que les bancs hélas clairsemés de l’amphi ou le désintérêt de la presse cruellement absente. La vision introspective rarement exposée dans le cliquetis des canons idéologiques étonnait par sa pertinence, la force de la rationalité et la richesse de la grille d’analyses proposée par ce « rebelle » néanmoins en rupture avec le « romantisme révolutionnaire ». Cet intellectuel « atypique », pour reprendre la formule du modérateur Balhi, livre les clefs du « printemps » arabe de la manipulation à grande échelle des valeurs démocratiques et humanitaires.
Arabesque$, revue et finalisée en monnaie américaine, détaille les mécanismes, les instruments et le financement structurel de la conjuration occidentale à alibi démocratique. Une conjuration qui s’appuie sur le rôle sacro-saint des Etats-Unis acquis au principe de « l’exportation de la démocratie » par les moyens de la « résistance non violente » largement expertisé dans les laboratoires de la manipulation en Europe de l’Est traversée par les « révolutions colorées » et dans le Moyen-Orient livré à la barbarie. Bensaada réfute toute forme de spontanéité du « printemps arabe » couvé et encadré par les organismes en charge de l’« exportation de la démocratie » : le NDI (National Democratic Institute) rattaché au parti démocrate et placé sous l’autorité de l’ancienne ambassadrice Madeleine Albright, et l’IRI, présidé par le républicain présents sur le terrain des opérations lorsque « les rues arabes étaient calmes ».
Ce sont les « satellites » du NED attachés, comme le reconnaît Allan Einstein, à faire beaucoup plus que la Cia des coups d’Etat. L’historien américain William Blum ira plus loin. Il a clairement affirmé que « nous faisons à l’étranger ce qui est interdit chez nous. Le financement coule à flots de la NED (132 millions de dollars/an), de l’IRI (75 millions/an) et surtout de l’US Aid (104 millions pour les pays arabes en 2011). La stratégie de déstabilisation mondiale professe la « résistance violente », initiée en Iran et théorisée par Gene Sharp affairé à développer ce « substitut à la guerre ».
Des « révolutions colorées », mises en pratique en Serbie, en Ukraine, en Géorgie et au Kirghizistan, au « printemps » arabe, l’auteur s’est longuement attardé sur cette « technique de combat » uniformisée : une terminologie commune (Bezef, Barakat en Algérie, Kifaya en Egypte, y en a marre au Sénégal), des symboles, des banderoles, des scènes de fraternisation avec « l’ennemi » (les manifestants avec les chars en Egypte), des prières publiques coptes et musulmans… Le référent de base reste le point que l’on voit dans toutes les places publiques. Il a été imaginé par l’expert en subversion, le Serbe Srdja Popovic, disciple de Sharp.
Larbi Chaabouni
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